Hommage des assistantes sociales à Roger-Henri Guerrand


Roger-Henri Guerrand grand spécialiste du logement social nous a quitté le mercredi 11 octobre à Rennes, à l’âge de 83 ans. Professeur émérite à l’école nationale supérieure de Paris-Belleville il donnait des cours à l’Institut du Travail Social de Montrouge. Ces anciennes élèves, assistantes sociales ont tenu à lui rendre un dernier hommage que nous publions ici.



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Cher Roger-Henri,

Nous devions nous revoir à Paris à l’occasion de la présentation de ton dernier livre Henri Sellier, urbaniste et réformateur social écrit en collaboration avec Christine Moissinac. Arrivée au CEDIAS, on m’a appris que tu n’étais pas là pour des raisons de santé. Dès le lendemain, tu m’as annoncé par téléphone que tu avais un cancer du poumon alors que tu n’avais jamais fumé de ta vie. Un an plus tard, la maladie nous a définitivement privés de toi. Perte irréparable car tu étais pour nous, anciennes élèves de l’Institut du Travail Social de Montrouge et notamment la génération de 68, le modèle inégalé à suivre. Tu nous as initié à des méthodes de recherche sociale, à des études des milieux sociaux inédites et révolutionnaires pour l’époque qui nous ont beaucoup servi dans notre travail professionnel.

Tu as fait plus que cela puisque tu nous as communiquées ta curiosité, voire ta passion pour tout ce qui relève des problèmes sociaux auxquels sont confrontés les milieux populaires. Tes recherches dans ce domaine, inédites et révélatrices, t’ont imposé comme un pionnier de la question sociale et plus précisément de l’habitat social. Retenons pour mémoire : Mémoires du métro, La libre maternité (Casterman), Les lieux (La Découverte), histoire des commodités (La Découverte), Brève Histoire du service social en France 1896-1976 (Privat) en collaboration avec Marie-Antoinette Rupp, Les commodités, Cent ans d’habitat social : une utopie (Albin Michel), en collaboration avec Roger Quilliot, C’est la faute aux profs !(La Découverte), A contre-voie : mémoires de vie sociale (1923-2000) (Infolio)…

A la section dite B International (il y avait là des étudiantes de tous les pays) de l’Institut du Travail Social de Montrouge, tu nous a aidées à élargir notre horizon vers les grands du monde. C’est bien toi qui, le premier, m’as initiée au sociologue Ibn Khaldoun dont j’ignorais totalement l’existence.

Nous tes étudiantes, nous n’oublierons jamais ta science, ton élégance, ton humour, ta disponibilité, ton humanité. Après nos études, nous avons lié une relation d’amitié indéfectible avec toi. C’était toujours un bonheur de te rencontrer de temps en temps et de pouvoir converser avec toi. C’est ce qui fait que nous perdons en toi un grand ami fidèle et un guide précieux.

Hania Yanat

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Nous ajoutons à l'issue de ce texte l'hommage officiel rendu par le ministre de la Culture :

Roger-Henri Guerrand était le grand spécialiste du logement social en France et en Europe. Précurseur et iconoclaste, il avait su imposer une nouvelle approche de l’histoire de l’architecture, en y intégrant les notions jusque là minorées de vie quotidienne, de confort et d’hygiène.
Il avait soutenu la première thèse française consacrée à l’histoire du logement populaire en 1966. On lui doit notamment Les Origines du logement social en France (1966), Brève histoire du Service social en France (1976), Les Lieux, histoire des commodités (1985), Cent ans d'habitat social (1989), Le Confident des Dames, le bidet du XVIIIe au XXe siècle (1998).

Autant d’ouvrages faisant aujourd’hui référence, mais aussi d’articles et de contributions, à travers lesquels il n’a eu de cesse d’interroger toujours avec humour et parfois provocation ses thèmes de prédilection qu’étaient l’architecture, la ville et les citadins, l’hygiène et le corps, le sexe et la beauté.

Professeur émérite à l’école nationale supérieure de Paris-Belleville (ex-UP8), son enseignement a profondément influencé plusieurs générations d’enseignants et d’étudiants. Celui que l’on définissait comme un historien de la vie quotidienne en milieu urbain fut finalement distingué comme Grand Prix de la critique architecturale en 1985, pour l’ensemble de son œuvre.

Très récemment, lors de la remise officielle de ses insignes d’officier dans l’ordre des arts et lettres, à l’école nationale supérieure d’architecture de Paris-Belleville, Roger-Henri Guerrand, quoique très diminué, avait fait preuve devant un auditoire médusé de son immense vitalité intellectuelle et de son profond intérêt d’historien mais également d’homme pour le genre humain.

Le ministre de la Culture
Renaud Donnedieu de Vabres



Dimanche 17 Décembre 2006

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